En Corrèze, l’union des forces libérales est au cœur des actions de terrain. Réunions de concertation pour traiter des cas complexes, initiatives en santé environnementale et renforcement des liens interprofessionnels illustrent un engagement fort pour une médecine de qualité. Cet article met en lumière ces projets qui, loin de céder au pessimisme ambiant, prouvent que la coopération est un puissant levier pour répondre aux besoins des territoires.
Portrait santé*
Superficie : 5 857 km²
Nombre d’habitants : 238 445
Nombre de communes : 279
Établissements de santé :
- 9 hôpitaux publics
- 2 cliniques privées
Ensemble des médecins (tout statut) : 686
Âge moyen : 52,7 ans
Médecins généralistes libéraux et mixtes :
- 190 (dont 98 de + de 55 ans)
- Densité 79,7
- 62,87% d’hommes et 37,13% de femmes
Médecins spécialistes libéraux et mixtes :
- 196 (dont 93 de + de 55 ans)
- Densité 82,2
- 72,67% d’hommes et 27,33% de femmes
Variation de la densité médicale (2010/2023) : 1,20%
Nombre d’actes techniques/an : 601 863 (dont 57 051 en médecine générale et 544 812 en médecine spécialisée)
Nombre d’actes cliniques/an : 1 096 756 (dont 867 113 en médecine générale et 229 643 en médecine spécialisée)
Taux de médecins généralistes participant à la permanence des soins (PDSA) : 70%
Exercices coordonnés :
- 4 CPTS (82% du territoire couvert)
- 23 Maisons de santé
*Les sources : Statiss 2022 – Atlas de la démographie médicale 2023 – ISPL 2022 – CCAM 2022 – Agora Lib’ Oct. 2023
Monter des projets en parallèle de l’activité, pour un exercice médical intéressant et riche
Dr Vincent MAUGARS, Médecin Généraliste, Objat
Médecin généraliste, je suis installé en cabinet avec un associé à Objat près de Brive depuis 2 ans et demi, avec un projet de restructuration des locaux mené avec la mairie pour permettre une nouvelle installation sur la commune.
Ma volonté, dès le départ, était de mettre au goût du jour la pratique autour de projets en parallèle de l’activité clinique, comme l’accueil des étudiants qui est effectif depuis 1 an et demi, ou encore la création d’une CPTS qui devrait être effective dans l’année. Ce sont des projets sur lesquels nous sommes force de proposition et qui permettent d’exercer de façon plus intéressante, d’améliorer nos pratiques et de se rencontrer. Et puis, il est plus pertinent de monter un projet qui va nous ressembler plutôt que de devoir prendre le train en marche.
Evidemment, nous sommes dans la même conjoncture que les autres départements, avec un problème d’accès aux soins qui est patent. Alors, nous priorisons les problèmes de santé chroniques ou oncologiques. L’objectif de la CPTS est de permettre une meilleure identification de ces malades, de fluidifier leur prise en charge, de monter des projets d’éducation thérapeutique, de mettre en place des réseaux médicaux et paramédicaux pour améliorer leur prise en charge.
A Brive nous avons la chance d’avoir des spécialistes qui comprennent nos problématiques et qui essayent de nous aider à les résoudre. Nous coopérons avec les acteurs du domicile, les IDEL, la PTA (Plateforme Territoriale d’Appui). Le but est de formaliser, de valoriser et de rendre plus effectives toutes ces actions que l’on menait déjà. C’est aussi l’occasion de faire émerger des projets, des parcours, et de mutualiser des outils (annuaire commun).
Cela permet de mieux fonctionner et de gagner du temps médical. C’est la ressource la plus précieuse pour tout le monde actuellement. Si la clinique et l’hôpital veulent collaborer avec la CPTS pour améliorer l’articulation ville- hôpital, cela éviterait aussi des passages aux urgences et des délais d’accès aux médecins spécialistes. Alors qu’on arrête les vases communicants et qu’on trouve des solutions plus franches !
C’est ce qui va donner envie aux jeunes de s’installer. En tant que jeunes médecins nous n’avons pas du tout les mêmes aspirations que nos aînés, nous nous installons en groupe, nous ménageons l’équilibre entre notre vie professionnelle et personnelle. Monter des projets c’est bénéfique pour sortir d’une routine et cela permet d’avoir une activité qui reste riche et intéressante tout le long de notre carrière.
Conseil Départemental de l’Ordre des Médecins de la Corrèze
Dr Jean-Marie CHAUMEIL
Notre département de la Corrèze, comme beaucoup d’autres territoires, subit les conséquences des erreurs accumulées en matière de gestion de l’offre de soins.
En effet, beaucoup de patients n’ont toujours pas accès à un médecin généraliste et par ailleurs les délais de rendez-vous pour certaines spécialités sont très longs. Les secteurs les plus impactés sont ceux de Brive, Tulle, Uzerche et Bort les Orgues. Plus grave, nombre de patients en ALD, donc des malades avec des pathologies chroniques graves, n’ont pas de médecin traitant. Cela n’est pas digne d’un pays développé de l’Union Européenne.
L’âge moyen élevé des médecins en activité est un autre motif d’inquiétude, mais l’amorce récente d’un regain d’inscriptions de jeunes médecins tempère notre pessimisme.
Diverses solutions ont été mises en œuvre ou sont en projet.
La création de maisons de santé par les collectivités territoriales a permis d’améliorer partiellement la situation. Le département de la Corrèze a déployé sur une grande partie de la haute Corrèze une maison de santé en salariant des médecins sur plusieurs sites. La municipalité de Tulle a fait de même en créant une maison de santé où exercent des médecins salariés. Enfin, outre ces initiatives à Brive, la Mutualité a établi également des sites de consultations avec des médecins salariés. Certains de ces médecins étaient des libéraux et retraités de leur activité libérale, sollicités, ils ont accepté de continuer avec un statut de salarié. On observe donc actuellement, mais peut-être momentanément, une progression de la médecine salariée par rapport à la médecine libérale.
Par ailleurs, la Corrèze accueille des médecins d’origine étrangère de différentes spécialités, originaires ou non de l’UE, avec des diplômes européens ou pas. Cet afflux est lié à la pénurie de médecins français et à l’action des collectivités territoriales en recherche de médecins pour pallier les départs en retraite des confrères sans succession. Pour le conseil de l’Ordre, c’est un travail accru car la validation de ces médecins et leur inscription présentent des difficultés supplémentaires (reconnaissance des diplômes, langue, maitrise du français).
Bien entendu, cette situation difficile entraîne des dysfonctionnements du système de santé avec notamment un engorgement des services d’urgence hospitaliers. Le déploiement du service d’accès aux soins (SAS) qui a débuté sur le département est sensé améliorer la situation et le bilan semble plutôt favorable actuellement. Enfin un projet de « Médicobus » itinérant est en gestation ?!?!
Comme ailleurs, la Corrèze connaît l’apparition des CPTS, l’émergence des professions intermédiaires et le développement des délégations de tâches. Cela aura certainement des conséquences sur notre profession et celles-ci ne lui seront pas forcément favorables. Ici aussi, en Corrèze, nous subissons les contraintes des succédanés de la pénurie et d’évolutions proposées, encouragées ou imposées.
Comme suite aux aléas des négociations conventionnelles un nombre restreint de médecins se sont déconventionnés.
Nul doute que les modes d’exercice sont en pleine mutation, que les aspirations des jeunes médecins évoluent, et il est difficile de discerner dans ce contexte ce qu’il va advenir de la médecine libérale et tout simplement de la médecine en Corrèze comme en France.
Dispositif d’Appui à la Coordination de la Corrèze (DAC 19)
Porté par l’association « Parcours santé Corrèze », le DAC est un point d’entrée unique et gratuit pour les professionnels et structures qui souhaitent des informations sur les ressources du territoire, un soutien pour accompagner les personnes en situations de santé et de vie complexes, quels que soient leurs âges ou leurs pathologies.
Lorsque vous êtes face à un patient dont la situation de santé est complexe, vous pouvez faire appel aux 17 coordinateurs de parcours qualifiés (infirmier, assistant social…) du DAC 19.
Avec l’accord de la personne concernée, les coordinateurs partagent et échangent avec vous et avec les professionnels du cercle de soins, les informations utiles et indispensables à la coordination du parcours de santé, de manière sécurisée grâce à Paaco globule.
Le DAC 19 est également investi dans des dispositifs complémentaires :
- Coordination départementale du dispositif « prescription d’éducation physique en santé » (Peps) ;
- Accueil téléphonique de la Plate-forme de Coordination et d’Orientation destinée aux enfants de moins de 7 ans présentant des Troubles du Neurodéveloppement (PCOTND) ;
- Interlocuteur pour les personnes souffrant des symptômes post-Covid ;
- Mise en œuvre d’une expérimentation nationale de repérage des fragilités via un programme de prévention de la perte d’autonomie axé sur le dépistage multidimensionnel du déclin (ICOPE), expérimentation portée par 3 CPTS.