En Gironde, l’intelligence collective prend tout son sens pour réinventer la médecine libérale. Entre les réunions de concertation pluriprofessionnelles pilotées par les CPTS, le renforcement des liens entre ville et hôpital, ou encore l’organisation de journées dédiées à la santé environnementale, les médecins montrent qu’il est possible de conjuguer liberté et collaboration. Cet article met en lumière ces initiatives, véritables réponses d’espoir dans un contexte souvent marqué par l’incertitude.
Portrait santé*
Superficie : 9 976 km²
Nombre d’habitants : 1 681 330
Nombre de communes : 535
Établissements de santé :
- 14 hôpitaux publics
- 19 cliniques privées
Ensemble des médecins (tout statut) : 6 514
Âge moyen : 48,4 ans
Médecins généralistes libéraux et mixtes :
- 1854 (dont 771 de + de 55 ans)
- Densité 1110,3
- 54,16% d’hommes et 45,84% de femmes
Médecins spécialistes libéraux et mixtes :
- 2214 (dont 881 de + de 55 ans)
- Densité 131,7
- 57,41% d’hommes et 42,59% de femmes
Variation de la densité médicale (2010/2023) : 16%
Nombre d’actes techniques/an : 6 619 565 (dont 367 983 en médecine générale et 6 251 582 en médecine spécialisée)
Nombre d’actes cliniques/an : 11 691 881 (dont 8 403 733 en médecine générale et 3 288 148 en médecine spécialisée)
Taux de médecins généralistes participant à la permanence des soins (PDSA) : 62%
Exercices coordonnés :
- 18 CPTS (92% du territoire couvert)
- 29 Maisons de santé
*Les sources : Statiss 2022 – Atlas de la démographie médicale 2023 – ISPL 2022 – CCAM 2022 – Agora Lib’ Oct. 2023
Mise en place de réunions de concertation pluridisciplinaire dédiées aux patients avec des douleurs chroniques
Angiologue libérale dans un pôle pluridisciplinaire à Mérignac depuis 2016, c’était une évidence pour moi de rejoindre l’initiative territoriale de réunions de concertation pluridisciplinaire dédiées aux patients avec des douleurs chroniques qui se réunit les 3e mardi de chaque mois.
J’étais déjà à l’initiative du réseau Pey-Berland à Bordeaux, créé pour se faire connaitre et relier les paramédicaux et les médicaux dans et hors quartier. Alors, quand la pharmacie du pôle de Mérignac m’a invitée pour faire un EPU (Enseignement Post Universitaire) dans leur salle de réunion, d’autres soirées thématiques se sont développées. Et j’ai pu inviter des correspondants…
Il nous a fallu presque un an de mise en place car on tenait à partir des besoins des professionnels de santé en libéral. On a vite compris qu’il fallait vraiment fluidifier la communication mais c’est aussi un mode de fonctionnement nouveau en libéral, à l’organisation chronophage.
La requête, en revanche est très simple. Il y a 2 questionnaires à remplir, un pour le patient et un pour les professionnels mobilisés autour de celui-ci. Les questionnaires sont envoyés par mail à la CPTS, et sont ensuite réceptionnés par l’équipe de 8 médecins. Un binôme de coordinateurs prépare alors la présentation de la situation pour la réunion, réunit les examens et établit le listing des correspondants à inviter.
Nous sommes enthousiastes. Nous abordons la 2ème année, avec en moyenne une quinzaine de professionnels d’horizons différents à chaque fois. Nous présentons 2 ou 3 dossiers, pendant 30 à 40 min par situation, pour qu’il y ait un timing précis. Un modérateur structure la soirée et un compte-rendu est envoyé à l’ensemble des participants. Enfin un retour est fait au patient par le requérant. Il y a une liberté de parole. Ça permet d’actualiser la prise en charge du patient, d’accélérer les rendez-vous mais aussi de sortir d’une vision trop technico centrée sur la biomécanique et de trouver ensemble des solutions…
MSP de Maransin : une structure attractive pour les patients afin de pérenniser l’offre de soin sur le territoire
Le 15 mars 2024 Mme Prisca THEVENOT, Ministre déléguée auprès du Premier Ministre, chargée du Renouveau démocratique, porte-parole du gouvernement, est venue nous rendre visite à la Maison de Santé Pluridisciplinaire (MSP) de Maransin.
Cette visite représente pour nous la reconnaissance de notre travail depuis de nombreuses années. En effet, les premières démarches remontent à 2012 où le Dr Moraud et M. Seynat, Maire de Maransin, ont sollicité l’ARS dans le but de pérenniser l’offre de soins sur tout un territoire. Si Maransin ne compte que 1 026 habitants (2015 INSEE), il existe sur cette commune depuis de très nombreuses années au moins un médecin et une pharmacie. Grace à la MSP, depuis 2020, date de son ouverture, des professionnels de santé ont rejoint l’équipe qui se compose actuellement de 2 médecins, 1 sage-femme, 2 kinésithérapeutes, 2 psychologues, 1 diététicienne, 1 pédicure podologue, 2 infirmières et 1 pharmacienne. La MSP est une véritable structure attractive pour les patients, qui bénéficient de différentes spécialités, et aussi pour les soignants. Pour preuve, la sage-femme qui a transformé un mi-temps à un temps plein au sein de notre structure, délaissant son cabinet de ville pour privilégier sa vie professionnelle et familiale à la campagne. Elle regrette de n’avoir pas eu le courage de modifier son orientation plus tôt.
Les charges de fonctionnement de la MSP sont réparties équitablement entre tous les professionnels qui utilisent les locaux, en fonction de leur temps passé, de manière à permettre à tous d’avoir une place sans avoir trop de frais. Les dimensions rationnelles de notre MSP favorisent également la limitation des coûts. La Mairie, propriétaire du bâti, fait un partenariat et un accompagnement bienveillant avec l’aide de la Communauté d’agglomération du libournais, pour tout mettre en œuvre afin de pérenniser la structure. Des pauses cafés/repas ou des « piailleries » improvisées sont indispensables à notre bon fonctionnement.
Tous les professionnels éligibles font partie de la Société Interprofessionnelle de Soins Ambulatoires (SISA), structure juridique obligatoire pour faire vivre la MSP et lui permettre de recevoir de la CPAM, MSA, ARS, Collectivités… les budgets nécessaires pour le fonctionnement, la mise en place et le financement de projets qui améliorent la prise en charge des patients. Ses actions sont pilotées par la « Coordinatrice Santé », salariée de la maison de santé, qui fait le lien avec les différents partenaires cités plus haut. Véritable animatrice, elle joue un rôle essentiel dans la vie de la maison de santé pour faire vivre le « comité des usagers », animer nos réunions mensuelles autour de différents dossiers complexes de patients (essayer de trouver les solutions les plus adaptées pour leur prise en charge), programmer les actions des différents intervenants et faire le lien sur des thématiques préventives : par exemple l’obésité, le mal être, le tabac. La délégation de tâches s’opère avec la pharmacie du village pour la prise en charge de certaines pathologies.
Les deux médecins sont Maitres de Stage Universitaire et accueillent des étudiants en collaboration avec la faculté de médecine de Bordeaux. A ce jour cette pratique n’est que bénéfique pour l’étudiant qui peut appréhender sereinement l’exercice en mode semi rural, l’hôpital de Libourne est facilement accessible et n’est qu’à 18.5 km. C’est également bénéfique pour nous autres vieux médecins ce qui nous permet de dépoussiérer et actualiser nos connaissances en faisant un débriefing post-consultation, que l’étudiant soit en observation, supervision directe ou en autonomie. Nous espérons que cette collaboration va nous permettre de fidéliser de nouveaux médecins au sein de la Maison de Santé. Avec l’aide d’une « Community manager » les réseaux sociaux diffusent notre offre d’installation (www.maisonsantemaran-sin.com) et valorisent la diffusion de notre film « Toubib or not to be » visible sur YouTube.
Conseil Départemental de l’Ordre des Médecins de la Gironde
La population de la Gironde a augmenté de près de 7% depuis 2015 pour atteindre 1 654 970 habitants en 2021. De ce fait, l’habitat de la métropole bordelaise s’est densifié considérablement et l’accès aux soins y devient plus difficile malgré une offre meilleure que dans beaucoup d’autres territoires de Gironde. Le département comporte un CHU et plusieurs centres hospitaliers réunis en un GHT Alliance Gironde, deux Centres Hospitaliers Spécialisés et de nombreux établissements privés. 10 180 médecins sont inscrits au tableau de l’Ordre départemental. Le taux de médecins généralistes de 11,4 pour 100 000 hab., supérieur à celui de la Nouvelle Aquitaine (9,7) et de la France hexagonale (8,4) (ORS-NA 2023) doit être pondéré par le nombre croissant d’exercices particuliers.
Côté spécialistes, la densité en gynécologues et en dermatologues est en baisse régulière et l’âge des médecins en forte augmentation. Le Médoc, la Haute-Gi-ronde ou la Basse-Gironde sont en difficulté et la nécessité d’un travail collaboratif se fait sentir avec la création de 11 CPTS et 33 MSP. L’accès aux urgences reste un problème crucial malgré la participation des établissements privés et le SAS qui assure la prise en charge de plus de 50% des dossiers médicaux de régulation. L’impatience et l’irritabilité des patients se reflètent dans le nombre de plaintes et de signalements adressés au Conseil et l’augmentation du taux de non-conciliation (60%). Le Conseil départemental se mobilise fortement sur l’état de santé des médecins et les agressions de plus en plus fréquentes dont ils sont victimes.
Comme toujours, l’avenir repose sur les jeunes dont les motivations à exercer une médecine de qualité ne peuvent être remises en question mais dont les exigences d’exercice sont pour l’instant difficiles à satisfaire. Un exercice salarié, une collaboration pluriprofessionnelle et une réorganisation de la permanence des soins sont des options qui peuvent les séduire mais une répartition homogène dans tous les territoires ne se fera pas sans un vrai plan d’attractivité sur l’ensemble de la Gironde.
Dispositif d’Appui à la Coordination de Gironde (DAC 33)
Les spécificités du DAC 33 :
- Coordination territoriale et appui aux professionnels : Connaissance fine des ressources territoriales permettant une orientation adaptée, expertise de la coordination ; structuration des parcours santé en coopération avec les CPTS, appui aux sorties d’hospitalisation auprès des établissements de santé.
- Gestion des places d’Hébergement Temporaire d’Urgence : 17 places réparties sur 13 EHPAD – 15 jours renouvelable 1 seule fois. + de 60 ans Appelez-nous pour évaluer l’éligibilité de votre patient.
- ICOPE, pour repérer les personnes fragiles chez les plus de 60 ans et les inscrire dans un parcours de prévention.
La Fédération des dispositifs d’appui à la coordination (FéDAC)
« La Fédération des dispositifs d’appui à la coordination (FéDAC) a pour objet de représenter les acteurs œuvrant dans le domaine de l’appui et/ou de la coordination aux parcours de santé en Nouvelle-Aquitaine.
Pour y parvenir, elle développe les coopérations avec les représentants des professionnels du premier recours (CPTS, MSP, ESP…).
Elle soutient le déploiement des démarches de prévention (ICOPE, patients chuteurs) à l’échelle régionale. La FéDAC œuvre pour rendre lisible le rôle des DAC dans les interfaces ville-hôpital au travers de plusieurs leviers : SAS, cellule territoriale de gestion des lits, sécurisation du retour à domicile après hospitalisation, hébergement temporaire d’urgence (HTU)… Elle accompagne les DAC et leurs partenaires dans la démarche d’observatoire des ruptures de parcours et la mise en place du plan personnalisé de coordination en santé (PPCS). Elle participe à l’amélioration de l’accès et de l’organisation de l’offre sur les territoires. Enfin, elle soutient ses adhérents dans la réalisation de leurs missions au bénéfice de vos patients et en appui de votre pratique. ».
La FéDAC, en bref :
- 12 DAC départementaux
- 75 dispositifs unifiés (MAIA, réseaux de santé, PAERPA,…)
- 43 territoires de proximité
- 400 salariés
- 38 000 personnes accompagnées (information/orientation/coordination)
- 25 000 appuis à la coordination de parcours de santé complexes (gériatrie, santé mentale, maladies chroniques, handicap, enfance,…).
